Une figure maternelle, rayonnante et richement vêtue, porte un enfant. Elle resplendit, le serrant fièrement dans son bras droit. Sa robe ornée de liserais brodée se noue au niveau de la taille. Une haute coiffe aux nombreuses épaisseurs de tissus, bombée comme une mitre de dignitaire, lui donne un air de majesté. Elle porte à son cou deux lourdes croix tracés au pinceau. L’enfant, lui aussi, arbore la croix. Sont-ils humains ou bêtes ? Ces deux personnages aux grands yeux ronds, au nez en triangle comme un bec de Toucan, aux doigts démesurés comme des pâtes. Surgis d’une procession religieuse ou d’un jardin d’Eden, la figure de la mère semble auréolée de lumière. Les touches du pinceau trace des raies autour de sa silhouette, donnant à l’ensemble un air de jungle luxuriante avec guirlande de feuilles, plumes ou pétales tourbillonnant. Deux grandes palmes dentelées encadrent la composition. Sur trois des quatre coins de l’œuvre, comme des rideaux ouverts sur la forêt, des lucarnes tracés à la brosse achèvent le décor. Dans l’une d’elles, en bas à droite, l’artiste a signé de son nom.
Le peintre reprend ici le code classique de la peinture religieuse. La Vierge présente au monde le Sauveur. La saturation du fond et son ornementation presque textile rappellent les tapisseries mille fleurs du Moyen-Âge. Il y ajoute des éléments bucoliques, silvestres et fantasques propres à son univers personnel. Les figures d’êtres hybrides, presque toujours identiques d’une œuvre à l’autre, sont conçues comme immuables. Son univers associe rêveries cosmiques et fascination pour la Lune, le folklore catalan, la faune savoyarde et les fantaisies singulières. L’artiste confie avoir souvent contemplé l’astre de la nuit et imaginé ceux qui la peuplaient lorsqu’il était jeune berger. Il est aussi inspiré par les vedettes véhiculées par les médias, lui qui peint télévision et radio allumés. Les créatures qu’il invente sont aussi bien des êtres de chair idéalisés que des créatures surgies de son imagination. Une imagination fertilisée par une vie passée au contact de la nature. Loin de tout réalisme, Anselme Boix-Vives peint des figures de son temps dans une forêt mentale flamboyante. L’artiste a consacré du temps à l’écriture d’un plan pour la paix mondiale et son œuvre picturale est tout autant consacrée au bonheur universel qu’à l’expression d’émotions intimes. Dès 1964, le célèbre historien d’art Harald Szeemann organise une première exposition personnelle à la Kunsthalle de Berne (Suisse). Son œuvre est conservée dans la collection du LaM, musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut de Lille-Villeneuve d’Ascq, ainsi que dans celle de l’Art Brut à Lausanne. Elle a fait l’objet d’importantes rétrospectives à la Halle Saint-Pierre à Paris en 2009 et au musée des Beaux-Arts de Chambéry en 2017.
Comme dans les haïkus, ces petits poèmes puissants et brefs, l'artiste développe une œuvre vibrante qui célèbre l'évanescence des choses.
La haute montagne de Najia Mehadji se désagrège et tombe en flocons. Seule demeure une poussière céleste. René Guisset construit un carrousel comme une stèle à la vie quotidienne d'un monde rural disparu. Anselme Boix-Vives, poète mystique, peint une ode à la nature et le petit peuple mi-humain, mi-animal qui y a trouvé refuge. Comme dans un songe, les visages et les plantes hybrides de Thérèse Bonnelalbay s’évaporent. Seule demeure une trace légère, une graphie secrète. Sonia Lawniczak fait surgir sur la toile ou la feuille des vues de villes à la dérive, évocation de pays rêvés ou parcourus. L'œuvre d'un Grégoire Koutsandréou est une promenade au cœur de territoires imaginaires. Guillaume Chocu invente un monde de silence où les êtres se meuvent en apesanteur. Jean Pous grave les figures d’une humanité heureuse, en osmose avec la nature.
Se promener dans la salle d’exposition comme dans un vrai musée, découvrir peintures, dessins et sculptures en 3D et écouter le conférencier présenter les cinq thèmes de la collection. Voilà ce que la galerie Art Sans Exclusion vous invite à vivre.